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Отечественная война в письмах современников (1812—1815 гг.)
Автор: Н. Ф. Дубровин (1837—1904)

Источник: Дубровин, Н. Ф. Отечественная война в письмах современников (1812—1815 гг.). — СПб.: 1882. Качество: 75%


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№ 263. Бенигсенъ — супругѣ.

21-го ноября 1812 г. Витебскъ.

Me voici heureusement arrivé, ma chère Marie, à Vitepsk, assez bien-portant. Je suis toujours très curieux d’apprendre [371] quel prétexte M-r Koutousoff aura pris de m’avoir éloigné de l’armée; je ne peux le deviner. Il ne peut pas m’accuser de désobéissance, ne m’ayant donné aucune commission à remplir depuis le 6 du mois passé; il ne peut non plus m’accuser de lui avoir manqué personellement, ce que je ne me suis jamais permis malgré ses grossièretés; je n’ai pas même répliqué les gros mots qu’il m’a fait dire, je les ai avalés jusqu’à un temps, où les circonstances me permettront de lui en témoigner ma reconnaissance. Je ne sais donc de quoi il peut se plaindre de moi; pour ses mensonges, je ne les crains pas, car l’Empereur est juste. Qu’on ne s’imagine pourtant pas que c’est pour Mr. Koutousoff que j’ai tant souffert; je n’ai que trop senti, que lui n’est pas l’homme qui doit maltraiter le général Bén. J’ai souffert uniquement pour le service de mon maître. Malheureusement je ne serai que trop vengé qu’il ne m’a plus consulté, et qu’après le 6 octobre il n’a plus voulu écouter mes conseils; le moment est arrivé, où on ouvrira les yeux sur les faux rapports et les fausses relations de Mr. Koutousoff, et si je ne me trompe, il doit regretter dans ce moment-ci déjà, que je ne suis plus avec lui, car il aura besoin encore des conseils d’un homme plus déterminé que lui.

Je reste ici encore trois ou quatre jours pour me bien reposer, et pour changer d’équipage, car la neige a commencé à tomber; il me faut donc des traîneaux pour continuer mon chemin pour Weliki-Luki, où j’espère recevoir déjà la permission de l’Empereur d’arriver à Pétersbourg, car je crois, que Ses intérêts le demandent qu’Il me parle; du reste, je suis toujours prêt a tout faire, ce qu’il voudra et ce qu’il m’ordonnera.

J’ai oublié de citer dans ma dernière lettre une anecdote par laquelle tu pourras juger du caractère de Mr. Koutousoff et de ses intentions envers moi. Deux jours après l’accident de spasme que j’ai eu, il rencontre le prince Serge Galitzine; il lui demande: comment se porte Léon Léonovitch. Sur la réponse, que je vais beaucoup mieux, il lui dit: mais s’il voudrait aller se [372] reposer pour se bien rétablir, nous pourrions arranger la chose sans y mêler Pétersbourg; j’avoue que j’en ai été la dûpe et que j’ai pris cette déclaration pour argent comptant; mais quand il a vu qu’il ne pouvait pas se défaire de moi d’une bonne manière, il m’envoit un ordre sans rime et sans raison de quitter l’armée et, crainte que je ne dévoile tous ses mensonges à l’Empereur, il veut m’exiler à Kalouga — comment te plait cet homme?

Je te préviens que tu me trouvera bien changé; tous mes habits qui m’étaient trop étroits, me sont beaucoup trop larges mais je reprendrai quand je ne serai plus exposé au chagrin, comme je l’ai été.

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